L’Institut Pasteur a publié le 17/12/2020 une étude « sur les circonstances et les lieux de contamination par le virus SARS-CoV-2 » dont l’objectif est « d’identifier les facteurs sociodémographiques, les lieux fréquentés, et les comportements associés à un risque augmenté d’infection par le SARS-CoV-2 ». Elle a été abondamment commentée et pourtant les journalistes ne l’ont pas lue. Sinon ils auraient vite repéré quelques éléments qui ruinent sa crédibilité.
Cette étude avait été annoncée par le Premier Ministre le 15/12/2020 et elle devait selon lui « confirmer les arbitrages et les choix du gouvernement ». Au-delà de cette annonce et de cet aspect politique, elle était attendue avec impatience, beaucoup regrettant même qu’elle n’ait pas été menée plus tôt. Elle fut donc assez largement commentée par la presse dès sa publication.
La plupart des journaux en livrèrent les résultats les plus instructifs. Ils concernent les personnes contaminées qui ont pu identifier qui leur a transmis le virus. Parmi ces personnes, 35% disent avoir été contaminées au sein de leur foyer, principalement par leur conjoint. Parmi les autres 65%, celles qui ont donc été contaminées en dehors de leur foyer, 33,1% l’ont été dans le cercle familial, 28,8% dans le cadre professionnel et 20,8% par des amis.
Certains journalistes ajoutèrent que le repas semblait avoir joué un rôle central dans la contamination, tout en soulignant le fait qu’il n’était pas possible de mettre pleinement en relief l’impact de la fréquentation des bars ou des restaurants puisque la période d’observation se situait pendant le couvre-feu. L’épidémiologiste Arnaud Fontanet, présenté comme l’auteur de l’étude, fut interrogé sur ces différents aspects de l’étude.
Le problème c’est que tous ces journalistes se sont contentés de lire le communiqué de presse et le résumé de l’étude qui y était joint. Ils n’ont pas lu l’étude elle-même.
S’ils l’avaient lue, ils auraient constaté que certains paragraphes figuraient quasiment à l’identique dans le Résumé introductif, dans le corps de l’étude, puis dans la dernière partie intitulée « Interprétation et principaux enseignements ». Dans une étude scientifique cette partie est supposée constituer le fruit des pages qui ont précédé. Il n’en est rien ici puisqu’une large partie de ces deux pages de conclusion a déjà été lue deux fois précédemment.
Mais le plus navrant est que si le texte de ces paragraphes est repris parfois au mot près dans les trois parties du document, les chiffres diffèrent. Ainsi de la répartition des contaminations hors foyer entre les trois sources évoquées (cercle familial, milieu professionnel et milieu amical). Les pourcentages respectifs sont 33,1% – 28,8% – 20,8% dans le résumé et dans la conclusion (ainsi que dans le communiqué de presse). Mais dans le corps de l’étude ils sont différents : 32,9% – 27,1% – 22,1%.
Et si l’on se penche sur les tableaux présentés après le texte de l’étude, ce sont ces derniers chiffres que l’on peut reconstituer.
Certes nous sommes dans les mêmes ordres de grandeur mais les écarts sont nets. Une telle erreur est absolument stupéfiante dans une étude de cet acabit. Il est évident que si un journaliste l’avait repérée nous aurions eu droit à des gros titres scandalisés. Et il est probable que si un journaliste avait simplement remarqué que de nombreux paragraphes de l’étude se répétaient deux ou trois fois nous en aurions aussi entendu parler.
Or il est impossible de lire cette étude (10 pages de texte) sans repérer ces éléments.
Deux conclusions s’imposent donc.
D’une part il est évident qu’aucun journaliste n’a lu cette étude avant d’en parler.
D’autre part avec une rédaction aussi pauvre et aussi évidemment fautive, il est difficile de croire que cette étude a été menée avec le sérieux et la rigueur nécessaires. En tout cas il est certain qu’elle n’a pas été relue.