Certains journalistes évoquent l’affaire Pénélope Fillon sous le terme de « PénélopeGate ». Cette manière de faire est loin d’être anodine.

Certes PénélopeGate c’est plus court et plus percutant que « scandale Pénélope Fillon » ou « affaire Pénélope Fillon ». PénélopeGate sonne comme un slogan, comme un nom de marque, que l’on retient. Mais au-delà de ce simple impact sonore, le suffixe Gate donne sans le dire une dimension supplémentaire à cette affaire.

Ce suffixe est en effet traditionnellement utilisé pour exprimer la notion de scandale politique de grande ampleur.

Rappelons son origine aux plus jeunes : en juin 1972 (année électorale aux Etats-Unis) des « cambrioleurs » sont interpellés dans un immeuble de Washington baptisé Watergate et occupé par le Parti Démocrate. On démontrera que ces « cambrioleurs » installaient en réalité des systèmes d’écoutes clandestines pour la Maison Blanche et le Parti Républicain. Cette affaire n’empêchera pas Richard Nixon d’être réélu en novembre 1972 mais elle le poussera finalement à la démission en août 1974.

Ce scandale est particulièrement cher au cœur des journalistes car sa conclusion finale doit beaucoup à deux journalistes du Washington Post, Carl Bernstein et Bob Woodward.

 

Dustin Hofmann et Robert Redford : l'idéal du journaliste d'investigation.
Dustin Hoffman et Robert Redford : l’idéal du journaliste d’investigation.

Par la suite, ceux qui voudront donner une importance particulière à un scandale chercheront à le rapprocher de cette référence mythique. D’où l’utilisation de ce suffixe « Gate », officiellement devenu une marque d’infamie. On parlera ainsi par exemple de l’IranGate ou du MonicaGate.

Cette caricature d’étymologie a un équivalent en France avec le Téléthon et son suffixe Thon qui prétend véhiculer la notion d’endurance du Marathon, de même que Gate est donc désormais supposé porter la signification de « scandale ».

Peu de scandales français ont bénéficié d’une telle nomination en  « Gate », généralement réservée aux scandales américains de grande ampleur. L’intention de ceux qui ont lancé ce surnom de PénélopeGate est claire : il s’agit de gonfler l’importance de cette affaire d’une manière relativement discrète et donc efficace médiatiquement.

Une autre façon d’aller dans ce sens consiste, de manière assez classique, à annoncer des montants cumulés, toujours plus impressionnants que les revenus mensuels ou annuels. On a donc beaucoup parlé ces derniers jours des 500.000 euros reçus sur 8 ans, plutôt que de la moyenne de 62.500 euros annuels. Il suffira ensuite de feindre le lapsus pour mentionner, dans les titres d’un journal du matin sur une radio publique, un salaire annuel de 500.000 euros, loin de la réalité.

Rappelons que, comme le veut la raison d’être de ce blog, nous ne nous prononçons pas ici sur l’affaire elle-même, nous ne nous intéressons qu’à la manière d’en parler. Dans ce cadre, le surnom de PénélopeGate n’est pas innocent. Les intentions de ceux qui l’ont lancé sont claires mais beaucoup l’utilisent aujourd’hui sans en avoir conscience

2 commentaires sur « PénélopeGate : un surnom lourd de signification »

  1. Je suis bien d’accord avec tout ce qui est dit dans cet article. Mais je reste sur ma faim, car je cherchais une explication de texte concernant ce suffixe de « gate ». Je cherchais une réponse à cette question: quel est le rapport entre un scandale et une porte ?

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